En s’appuyant sur le journal de bord d’un grand ancêtre, le chirurgien de Marine Jean-René Bolloré, l’autrice nous entraîne vers la « Station de Chine », concession française de commerce et d’influence. Au XIXe siècle, les grandes puissances, Grande-Bretagne et France en tête, mais aussi Japon, Russie, États-Unis, entretiennent des concessions qui sans être des colonies sont des lieux privilégiés pour les liens avec l’Empire du milieu. Commerciaux, mais aussi scientifiques, diplomatiques et même religieux. Ils sont tissés par des personnages hauts en couleur, souvent nobles, mais aussi par de plus humbles, habités par le sens du devoir, du progrès, celui de l’aventure, voire de l’ambition.
De Manille à Macao, sous le soleil ou la tempête, l’exotisme frappe les passagers de cette expédition au long cours. La vapeur s’étend, mais la voile vit ses grandes heures. La vie à bord des navires, de toutes patries, obéit à des règles strictes, pleines de panache et de tradition, même entre ennemis. Et quand le vent tombe, la rame fait aussi bien l’affaire…
L’érudition – maritime, culturelle, artistique, historique – déployée dans ce livre en forme de récit de voyage est prodigieuse. Et pourtant si naturellement amenée, escale après escale, grâce à une écriture romancée, dialoguée, de correspondances avec la famille restée en Bretagne… Une plongée dans une époque pionnière qui se fait distrayante et rêveuse aussi, bercée par le roulis de l’Alcmène, les yeux remplis des merveilles de la Chine et des côtes adjacentes. Comme ce minuscule royaume oublié du Ryukyu, aux mœurs singulières, qui vit là ses dernières heures d’indépendance.